La fumée ça pique les yeux, chapitre 10
L' infirmière entre avec un petit gâteau »Bon anniversaire Hugo » elle me dit. Elle est gentille, l' infirmière. Dommage que je suis mort.
Je la regarde bien au fond de ses yeux trop bleus. Elle m'explique qu'elle a fait le gâteau exprès pour moi parce que ça doit pas être drôle de passer son anniversaire à l'hôpital.
_ »Je sais que c'est dur » elle me dit « mais tu sais,tu pourrais y arriver. si déjà tu acceptais de manger un peu, ça irai tout de suite mieux. Tu devrais essayer de parler. Au moins à l'amie de ta maman. Ca la rend très malheureuse de te voir dans cet état. elle va venir te voir, aujourd'hui. Le docteur est d'accord. Alors c'est peut être le moment d'y mettre un peu du tiens, tu ne crois pas? »
Elle m'a laissé avec mon gâteau.
Je m'en fout, ma maman, pour mon anniversaire elle me fait une tarte aux pommes. Elle me console, elle me dit que 7 ans c'est pas vraiment l' âge de raison, que c'est rien que des conneries, qu'en vrai l'âge de raison ça existe pas. Alors j'arrête de bouder et d'accord, je veux bien souffler les bougies, mais seulement si elle m'aide. Ensuite on mange la tarte avec les doigts et m'offre un déguisement de Zorro. Elle met un oreiller sous son T-shirt et se dessine une barbe avec son crayon à maquillage pour fair le sergent Garcia. Elle me courre après dans tout l' appartement mais j'arrive toujours à m'échapper parce que Zorro il gagne toujours à la fin.
Natacha entre sans frapper.
Pendant un instant je crois être dans notre appartement mais non, chez moi c'est de toutes les couleurs alors qu'ici c'est tout blanc, c'est tellement blanc que ça fait mal à la tête.
Elle me tend un gros Bourriquet en peluche. Je peux pas bouger, même juste tourner mon regard vers elle c'est trop difficile. Mes yeux restent dans le vide, dans le blanc.
Elle me glisse la peluche entre les bras, comme pour que je le protège, et pis elle me caresse la nuque et elle me souffle « Je t' aime, p'tit Go » comme pour elle même, comme elle l'aurait fait devant un tombeau, parcequ'elle voit bien que de toutes façons je l'entend plus.
Elle me garde longtemps dans ses bras pour sentir un peu de chaleur, un petit reste de vie qui bat encore en moi, que l'on m'injecte au creux des bras.
Elle a le visage tout creusé, Natacha. Ses yeux sont devenus si petits qu'on les devine à peine, mangés par des cernes tellement profonds qu'ils semblent être tatoués sur son visage. Son teint est livide, heureusement elle est sauvée par toutes ces taches de rousseurs qui pigmentent ses paumettes et la réaniment un peu.
Je sais que c'est de ma faute, à moi aussi. Natacha ya tout l'monde qui l'aime mais au fond il ne lui reste plus que moi.
Mais je ne peux pas, je n'peux plus rien pour elle.
Je n'peux plus rien pour moi non plus.
A SUIVRE ...